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Un peu de patience...

Paysages, rythme, formats de course, le Vendée Raid, une aventure variée !

29 juin 2021

Interview de Lucie Croissant (team FMR), championne de France de Raid 2019 sur le parcours du Vendée Raid avec Noémie Médina et Vincent Faillard.

Bonjour Lucie,
Merci d’accepter de répondre à nos questions pour le Raid Aventure Pays de Vie et le Vendée Raid.

  1. Est-ce que l’on peut dire que tu es une sportive exceptionnelle ?

Je ne me considère pas comme une sportive exceptionnelle, plutôt comme une sportive passionnée par beaucoup de formats de sport nature à base de course à pied et vélo, ça m’amène à faire des sports variés, du triathlon sprint en D2 (1H) à du raid aventure (90h), en passant par le swim run, raids vtt, dh, et trail.

IRONMAN, NORSEMAN ET DIAGONALE DES FOUS

Pour les non-initiés qui ne te connaissent pas, je te présente par quelques grandes dates et résultats comme suit[1] [2]:

Sainté-lyon,
CCC,
Ironman de Nice en 2011 1ère en -25ans,
Norseman 14ème [3], alpsman , embrunman, victoire sur Evergreen,
Grand raid de la réunion,
Vainqueur du Tri ROC (2 fois),
Vainqueur du Raid EDHEC,
5ème des mondiaux X-Terra,
Vainqueur de manches de coupe du monde de raid avec le team FMR.

« l’année après mon 1er enfant »

Lucie Croissant

2) Je ne me trompe pas ? Je n’ai pas été exhaustif, car il y a de nombreuses autres performances. Ce qui m’a le plus impressionné car j’étais présent et j’ai suivi la course pour la com’ du VR c’est quand tu as remporté le championnat de France de Raid 2019, 1ère équipe mixte mais surtout 1ère équipe au scratch !
Lors de la dernière CO, après 31h de course, je n’arrivais pas à vous suivre avec le téléphone en main.
Vous avez dézingué les meilleurs français à l’époque. Peux-tu revenir sur cette course ?

C’était l’année après mon 1er enfant, donc après une année sans courir, j’avais envie de faire toutes les courses du calendrier ! On s’était notamment inscrit sur les 24h du raid en Lozère, et j’étais plutôt dans les membres du team « non performants » pour les France car c’était seulement quelques jours après. J’ai eu du mal à trouver des coureurs pour faire la course avec moi, et c’est Vincent Faillard qui était bien motivé pour le faire avec Noémie Médina et moi finalement. Ça s’est décidé assez tardivement. Nous n’avions jamais couru tous les 3 ensemble.

« C’est la première fois que l’on courait tous les trois. Les filles ne se connaissaient pas avant. »

Vincent Faillard, ouest France

Je suis surtout super fière d’être arrivés devant le team FMR homme (qui était aussi 1er de leur catégorie), parce que ça n’arrivera pas souvent je pense, et ça permet de les taquiner !

3) Tu dis sur ta page Facebook [4]que tout le monde attendait votre erreur sur une balise durant ce week-end. Mais te rends-tu compte que depuis la création de ce raid vous êtes les seuls à avoir réussi à cocher toutes les balises.
La particularité du Vendée Raid, avant votre passage, c’était la stratégie. C’était : « Quelle section, quelle balise je vais laisser de côté ? » Franchement c’est énorme !
Vous avez poussé les organisateurs du Vendée Raid à revoir leur copie. T’en rends-tu compte ?

Ah je ne savais pas que personne n’avait réussi à prendre toutes les balises depuis le début du raid, je pensais que c’était uniquement lors des France !

En fait, comme nous n’avons pas l’habitude de ce format de course, on s’est surtout concentré pour ne pas faire d’erreur, mais nous étions assez large pour les portes horaires il me semble, du coup nous n’avions pas de stratégie à faire sur quelle balise ne pas prendre (il y en avait tellement et les pénalités étaient importantes alors nous avions la stratégie de toutes les prendre).

Une communication précise forgée en amont, des détails qui changent tout !

4) Comment abordiez-vous ce raid ? Dans quel état d’esprit l’avez-vous abordé, notamment lorsque vous avez reçu le road-book ?

Nous étions conscients de nos faiblesses : 2 filles, un mec, on va « logiquement » être moins fort physiquement. En posant ce point comme principe de base, il nous restait à être meilleur sur le reste : hyper rigoureux et attentif, le mot d’ordre : « on ne loupe pas de balises », on est efficace aux transitions, on est efficace dans la manière de valider la balise, dans l’ordre de qui valide. On a vraiment pensé comme une équipe, et non comme 3 individus. Des petites choses qui pouvaient nous faire gagner 5 secondes pour chaque balise, mais quand il y en a plus de 400…

Une autre faiblesse : nous ne nous étions jamais entraînés à 3 avant la course. Nous avons fait de ce « désavantage » une force. Avant le raid nous avons bien communiqué sur les objectifs de chacun, sur nos forces, nos faiblesses, en essayant d’être le plus objectif possible à 3. Après le binôme Nono et Vincent fonctionnait super bien, donc il me restait juste à m’incruster dedans 😊

Honnêtement, avec 2 filles pour une équipe scratch, on ne s’est jamais dit qu’on allait gagner la course mixte, encore moins celle au scratch. Seul Vincent avait peut-être une idée derrière la tête, mais sans la formuler.  D’ailleurs on s’est dit que ça allait être possible de gagner la course uniquement sur la dernière CO en fin de 2e journée, alors qu’on était devant depuis le milieu de la première journée. Quand on est passé en tête de la course sur le 1er kayak, ça nous faisait surtout rigoler, de se dire, mais ils sont où tous les costauds ?

Moi je pensais vraiment qu’ils allaient revenir sur nous à un moment, et je restais vraiment concentrée sur notre équipe, faire le mieux que l’on pouvait, peu importe la place qu’on occupait à ce moment.

5) Juste une question sur votre stratégie de course. Comment abordiez-vous les CO nocturnes ?
Mes souvenirs me trompent peut-être mais il me semble que pour trouver une balise de nuit vous aviez parfois tendance à allumer ou éteindre vos frontales. Est-ce vrai ?

C’est peut-être quelque chose que l’on fait sur certaines courses, mais je n’en ai pas le souvenir sur le raid Vendée. Il me semble qu’on était plutôt seuls de manière générale, et on éteint la frontale pour ne pas « donner » la balise aux autres trop facilement. Là il n’y avait personne, où pas grand monde avec nous, donc je pense qu’on les laissait allumées.

L'équipe qui remporte le championnat de France de Raid en 2019. De gauche à droite : Lucie Croissant, Vincent Faillard, Noémie Médina.
L’équipe qui remporte le championnat de France de Raid en 2019. De gauche à droite : Lucie Croissant, Vincent Faillard, Noémie Médina.

6) Quel était le rôle de chacun des membres de votre équipe lors du Vendée Raid ?

Vincent était l’orienteur principal tout le temps (vélo et trail). Noémie était la 2e orienteuse en vtt, et elle a vraiment bien fait le job car quand on oriente tout le temps comme Vincent, on fait obligatoirement des erreurs, et Nono en a laissé passer aucune.

Moi j’avais ce rôle en trail orientation. 

Je ne sais pas trop s’il y avait un capitaine, je gérais peut-être un peu plus la stratégie et communication aux transitions, mais globalement ça communiquait et on était attentif aux autres de manière naturelle.

« Une des courses dont je suis la plus fière »

Lucie Croissant

7) Cette victoire rentre-t-elle dans ton panthéon sportif ? Comment la classerais-tu ?

C’est une des courses dont je suis le plus fière, c’est sûr car il y a une victoire au bout, mais surtout parce qu’on a fait de notre mieux et que l’on a réussi à maîtriser cette course avec cette équipe de manière presque parfaite à mon sens. On n’a jamais eu de coups de pressions, c’était comme si tout « roulait ».

Bien sûr il y a eu des hypoglycémies, des erreurs, des petits bobos, mais on les a intégrés à la course sans aucun énervement.

8) Avec toute ton expérience mondiale, de courses difficiles, de raids mondiaux, comment qualifierais-tu le Vendée Raid ? Son organisation, le lieu, le concept (plus de 400 balises).
D’ailleurs, c’est quoi la différence entre le Vendée Raid et une manche de raid du circuit mondial ?

La différence, c’est déjà le nombre de balises, et en plus que l’on doit/ peut dormir 😊. Plus sérieusement, les manches mondiales de raids sont plus en « autonomie », il y a beaucoup moins de balises, et c’est souvent bien plus long (72h pour les plus courts), sur des cartes d’orientation moins précises, et plus en mode aventure.
Le Vendée raid est plus rapide, il y a des « vraies cartes d’orientation », et je trouve ça bien plus ludique, on n’a pas le temps de s’endormir. Il n’y a pas vraiment de gestion à faire pour le sommeil, l’alimentation, le matériel.

Un couple champion de France, deux maillots et une couche bleu-blanc-rouge.

9) 2019 n’était-elle pas une année particulière pour toi ?

Oui car j’ai fait une année off en 2018 niveau course à cause de ma grossesse. Donc c’était mon année de reprise, alors j’avais très envie de m’entraîner et de courir avec les copains du team. J’avais peur que la reprise soit difficile et que je me traîne niveau sport, mais j’ai fait des performances que je n’avais jamais faites avant (comme sur les France de raid).

Du coup j’ai fait un 2e enfant en 2020 pour être encore plus performante cette année… (je plaisante, je précise quand même)

10) Est-ce un raid qui t’a plu ? Est-ce que nous aurons la chance de t’y revoir un jour ?

Je partais avec un a priori plutôt négatif car j’aime le sport en montagne, c’est pour cela que je suis partie vivre en Isère alors que je suis originaire de Angers.

Et finalement, j’ai vraiment aimé la course, car vous avez fait une grosse organisation avec des parcours très variés, énormément de balises, de sections, de types d’orientation, de formats. En plus de l’ambiance avec la CO de nuit au milieu du village, ou sur la grande place de jour.

Aujourd’hui, je cible les courses qui sont quand même plus proches de chez moi, car c’est un peu une mission de traverser la France. Mais si l’occasion se présente d’être pas loin et dispo, je referai la course avec grand plaisir.

11) Qu’apporterais-tu sur ce raid pour l’améliorer ?

Pas grand-chose, si ce n’est peut être la partie kayak du premier jour[5]. C’était un grand moment pour se rappeler qu’il faut prendre soin de nos rivières, on était les spectateurs de l’impact de l’activité humaine sur la nature que nous aimons pourtant tellement traverser en kayak, vélo ou baskets.

12) Sur ton site[6] tu indiques avoir (être en train de) effectué ta transition énergétique.
Les raids respectent-ils la nature selon-toi ?
Des épreuves qui se disent « nature » le sont-elles vraiment ?

C’est un vaste sujet. Je dirai qu’il y a certes l’organisation des épreuves, il y a des organisations qui font attention à faire plus que le minimum (ravito, déplacements, goodies, etc.) les raids sont quand même plus avancés que beaucoup d’épreuves sportives. Concernant l’impact des raideurs sur les espaces naturels traversés, je n’ai pas d’avis.

A mon sens, c’est surtout l’impact de chaque raideur qui est important, pas uniquement lors de la compétition ; notamment avec tous les équipements à acheter, l’alimentation, les emballages, les trajets, et j’en passe. Je pense que quand on fait des courses difficiles, on va plus facilement faire des choix moins en phase avec la planète, car il y a l’excuse de « c’est déjà compliqué de faire la course, alors la planète ok, mais pas sur ce sujet ».

Je suis un peu revenue de ma pratique d’aller faire des courses aux 4 coins de la planète, pour aller découvrir  la nature tout en la polluant. J’ai aujourd’hui une approche plutôt radicale, car j’ai envie d’être en phase avec ce que je pense. Mais j’ai conscience d’avoir fait ma part de pollution avant. Maintenant, c’est un critère dans les courses que je fais, et je le dis clairement à mes coéquipiers. Je suis motivée pour courir avec vous, mais pas à l’autre bout de la planète, et si on évite l’avion c’est encore bien mieux.

13) Quelle est ton actualité sportive ? Tes objectifs à présent ?

Je fais un triathlon M à Embrun, samedi prochain. Je n’ai pas beaucoup nagé, mais ça fait longtemps que je n’ai pas fait de tri et je viens de là avant le raid, alors ça me manque un peu !

Ensuite un trail, l’UT4M 170 km mi-juillet.

Puis on fera Sud Raid avec le team FMR[7] (2 équipes !), en préparation de la finale des championnats du monde en Gallice (tous mes coéquipiers sont ok pour y aller en mini bus !!)

Merci Lucie d’avoir pris le temps de nous répondre.
Bon courage pour la suite et au plaisir de te voir courir chez nous le plus vite possible.



[1] http://www.kikourou.net/resultats/croissant+lucie.html

[2] https://lucie-croissant.fr/resultats/

[3] https://www.trimag.fr/triathlon/lucie-croissant-24-ans-et-finisher-du-norseman

[4] https://www.facebook.com/LucieCroissantTriathlon

[5] Ndlr la partie de cayak dans l’Yon autour de la Roche a mis en lumière une pollution très importante de la rivière.

[6] https://lucie-croissant.fr/

[7] http://www.team-fmr.fr/

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